mardi 30 janvier 2018

Puis-je citer des personnes réelles dans mon roman ?

Saviez-vous que Zola a essuyé une demi-douzaine de procès à cause de ses romans ? Saviez-vous que Jules Verne a dû s'expliquer devant un juge suite à la parution de Face au drapeau ? Plus récemment, c'est Nadine Monfils qui s'est retrouvée sur le banc des accusés.
Le point commun entre ces trois auteurs ? Certaines personnes s'étaient reconnues dans les pages qu'ils avaient écrites.
Alors, peut-on citer des personnes réelles dans ses œuvres ?

L'article 1er de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine stipule :
La création artistique est libre.
Cela ne veut cependant pas dire que les auteurs peuvent faire tout et n'importe quoi. Ils doivent aussi prendre en compte le droit à la vie privée, les lois sur la propriété intellectuelle et les lois condamnant l'injure et la diffamation.


Personnages fictifs

Si l'auteur invente un nom et un personnage, il ne court normalement aucun risque de poursuites.
Par contre, s'il vient à citer un personnage fictif créé par un tiers, là, le risque pointe le bout de son nez.
En effet, ce personnage fictif est protégé par le droit d'auteur et éventuellement le droit des marques. Son auteur et ses ayant-droits peuvent, dès lors, vous poursuivre.
Ainsi, la société Colmax a été assignée devant la cour de cassation par la société Archange internationale et Anne Y... car elle avait utilisé le prénom Angélique pour une série de films (pornographiques au demeurant !). (https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007050191&fastReqId=927724031&fastPos=6)
Si vous voulez utiliser un personnage fictif existant, vous devez obtenir l'assentiment de son créateur et de ses ayant-droits.


Personnes réelles

Si vous utilisez des personnes réelles, celles-ci peuvent s’estimer atteintes par l’usage de leur nom, prénom et voire même pseudonyme connu. Elles peuvent y voir une atteinte à leur vie privée, se sentir diffamées, injuriées d’être associées à un tel personnage fictif.
En cas de poursuites, le tribunal doit :
  • déterminer si la diffamation peut être retenue tel que le prévoit l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse :
Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation.
  • déterminer s’il y a un risque de confusion entre le personnage fictif et la personne physique bien réelle, si l’auteur a commis une quelconque faute, s’il existe un préjudice subi par la personne physique…
Comme pour les personnages fictifs, vous pouvez utiliser une personne réelle dès lors que vous avez obtenu son assentiment ou celui de ses ayant-droits.
Maintenant, si vous ne faites que citer une personnalité comme par exemple dans la phrase suivante : Thomas écoutait la radio où Lady Gaga, Beyoncé et consoeurs passaient en boucle, vous ne risquez rien.


Un personnage fictif basé sur une personne réelle

Vous pouvez aussi être tenté de créer un personnage fictif portant un autre nom qu'une personne réelle mais qui se base sur cette personne. Là encore, vous pourriez vous retrouver devant un juge.
C'est ce qu'a vécu l'auteure Nadine Monfils que je citais dans mon introduction. Dans ses romans Madame Edouard et La nuit des coquelicots, elle dépeignait un cafetier possédant une moto jaune, gros, abruti et qui n'aime pas les chiens au pelage noir. Or, un commerçant de la rue Lepic à Paris s'est reconnu dans ce personnage. Il a attaqué Nadine Monfils pour diffamation.
Une nouvelle fois, vous ne pouvez pas dire et faire tout ce que vous voulez.



Alors, que puis-je faire ?

Vous l'aurez compris : il faut faire attention à ce qu'on écrit dès lors qu'on crée des personnages qui se basent sur des éléments réels.
Quand c'est possible, demandez l'autorisation de la personne ou de ses ayant-droits.
Maintenant, si vous ne diffamez pas ni ne porter atteinte à la vie privée, il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Par exemple, ne dites pas que telle personne est homosexuelle même si c'est vrai comme des journalistes l'ont écrit sur un personnage politique dans l'un de leurs ouvrages. Ils se sont retrouvés devant un tribunal et condamnés pour atteinte à la vie privée.

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